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Catégorie : Culture Banda Page 1 of 4

LES ARTISANS FONDEURS DE NDANGUÉ !!!

Cet article est consacré à la fonderie de pièces en alliage d’aluminium à Bangui.

Mme Shella Yanémandji

Mme Shella Yanémandji est une autre jeune femme centrafricaine qui mérite amplement un coup de projecteur. J’étais loin de me douter, en allant faire un reportage dans le secteur de l’artisanat de la fonderie en Centrafrique, tomber sur une femme dans un milieu réputé être celui des hommes. Mme Yanémandji est une étudiante. Mais la réalité économique, comme pour beaucoup d’autres jeunes, ne l’a pas ménagé. Aussi a-t-elle décidé d’exercer un travail d’appoint afin d’éviter la noyade sociale. Je l’ai bien évidemment interviewé. Voici ce qu’elle dit :

« J’ai choisi ce métier parce que j’y trouve des avantages. Ces avantages dépendent de l’investissement dans le prix des matériaux. On peut récupérer jusqu’à 5 fois sa mise ».  À la question, comment se passe cette cohabitation parmi autant d’hommes ? Elle répond : « Seule parmi des hommes, je n’ai aucun problème. Parce qu’ils sont tous de la famille. Ils me respectent en tant que femme parce que je me respecte moi-même ».

Moi aussi, je la respecte parce qu’en tant que femme et comme toute femme banda, elle a su prendre ses responsabilités et se faire une place.

En septembre 2020, j’avais publié un article sur Jean-Baptiste Godin, l’ouvrier autodidacte, l’inventeur de la démocratie « familistérienne », pionnier industriel de la cocotte, des poêles et des fers à repasser. En parlant de lui, j’avais en tête une corrélation avec la fonderie en Centrafrique. Mais entre-temps la crise sanitaire a retardé mon voyage.

La fonderie en Centrafrique a pour vocation de satisfaire la ménagère à la demande en manufacturant une offre diversifiée.

C’est une fonderie non automatisée car les pièces qui y sont réalisées ne sont pas en série. L’équipement de façonnage est resté dans sa plus simple expression : essentiellement une activité de main d’œuvre. Il n’en reste pas moins que tous les critères de qualité sont respectés. Aucune pièce n’échappe, comme me l’explique Laurent, aux contrôles de qualité que les artisans s’imposent tout au long du processus de fabrication.

Laurent Arsène Boysambé

Tout part de ce quartier de Ndangué, qu’on appelle aussi Madou pour Rue Madou. Il faut tout penser, tout construire.

Mr Laurent Arsène Boysambé, très attaché à son quartier et à ses habitants, sans soutien, ni modèle d’identification, sans outil, se lance : il créé un atelier de fonderie. Afin de répondre aux besoins d’un grand nombre de ménage, il conçoit des produits utilisés quotidiennement par les ménagères. Laurent se présente comme « Ma Tawan formateur ». Ma tawan, littéralement « faiseur de casserole », est le terme local pour désigner l’artisan fondeur. Il y a bien longtemps maintenant qu’il est dans ce métier.

Il a gagné un savoir-faire qu’il perpétue dorénavant en transmettant ses connaissances et son expérience. À son échelle, il est, aujourd’hui, le moteur de l’intégration et de la formation des jeunes du quartier. Il leur donne des sources de motivation pour réduire l’impact des crises et de la précarité corollaire. Son principal levier est la promotion de l’effort. Beaucoup de jeunes sont passés sous sa férule ; Certains sont devenus aujourd’hui professeur, d’autres magistrat… Ce qui fait sa fierté.

Le cahier des charges, c’est-à-dire l’offre et la demande, dépend de la fourniture. L’aluminium employé provient la plupart du temps de la consommation locale des boissons pétillantes, sodas et bières : des canettes. Quelques matériaux recyclables que l’on qualifiera de ferraille viendront compléter cette fourniture.

Le savoir-faire du fondeur est mis au service du client en produisant des résultats extraordinaires.

La fonderie est un métier exigent. Laurent explique qu’ils évaluent d’abord le poids de la matière première, l’aluminium et les autres métaux connexes, pour pouvoir estimer combien de marmite ils pourront produire. Ils achètent aussi du charbon de bois qui servira de combustible.

Le fondeur réalise d’abord un moule en sable fin récupéré au fond d’une rivière ou d’un fleuve. De couleur jaune au départ, il devient noir sous l’action du feu.

Ce moule est un diptyque de parties se complétant : l’une destinée au fond et l’autre au-dessus. Ces deux fractions se positionnent l’une sur l’autre distant de l’épaisseur souhaitée de la pièce à réaliser. Cette épaisseur n’est au départ qu’un espace vide appelé à être comblé par la coulée de l’aluminium en fusion.

La fusion se réalise dans un petit four artisanal. Le four est une petite fosse. Un pot en matériau réfractaire et enduit de boue est placé au fond du trou. Cette boue, appelée « mascaille » pour masque, est utilisée en prévention d’une éventuelle fuite.

Du charbon de bois y est disposé et porté à très haute température. Le fondeur alimente le four en fourniture. Pour contrôler la fusion, la régulation de température est effectuée par « l’air à feu », une roue à manivelle faisant office de soufflet. Un gros tube prolonge la roue, emprunte un passage souterrain avant de déboucher sous le four. Le feu est ainsi attisé.

Du charbon est rajouté en fonction du besoin. L’aluminium en fusion est prélevé sous forme vraiment liquide du creuset (le pot). Les artisans appellent ce pot par son autre nom, « Rapide ». La fusion est ensuite coulée à travers les ouvertures prévues dans le moule. Celui-ci est rempli d’une traite pour éviter les aberrations de constitution.

Pour avoir un ajustage fin, des points repères sont cochés sur certaines parties des moules. Pour un rendu plus brillant, on utilise une poudre dont la composition ne m’a pas été communiquée.

Une autre chose que j’ai apprécié chez ces artisans, c’est leur esprit patriote : Ils tenaient tous à me montrer leur procéder d’estampage. Cela consiste à imprimer en relief « RCA (République centrafricaine) » pour signifier leur « Made in ». Ils me disent : « Ainsi, partout dans le monde, on saura que la pièce vient de Centrafrique ».

Le moule nécessite un châssis qui pourra faciliter par la suite le démoulage. Il s’agit alors d’un décochage car c’est à ce moment qu’on casse le moule pour récupérer la pièce qu’on vient de couler.

Le grain de la réalisation, c’est-à-dire le rendu de la finition dépendra du tamisage du sable.

Une fois la pièce démoulée, on parachève l’opération en éliminant les traces des bavures et autres excroissances. C’est l’ébarbage qui est le début des finitions. Car ensuite il faudra passer aux phases du limage, du ponçage et du polissage. Cette partie est réservée au « finisseur » qui lisse le fond, enlève la cale avec sa lime et sa brosse.

À ma connaissance il n’y a pas de règlementations connues en vigueur. Seul le savoir-faire du fondeur offre une garantie pour la confiance du client. Néanmoins, de nombreux et graves accidents sont à déplorer. Mais on n’en parle qu’à mots couverts. Il m’a été rapporté des accidents survenus dans ce type de lieu. Il s’agit souvent d’explosion aux conséquences graves. Problème dû certainement à un défaut d’étanchéification des fosses. Mais on ne s’épanche pas trop sur ce sujet.

En tout cas, j’ai été en contact d’un personnel hautement qualifié et responsable. Il a la capacité de concevoir les pièces de manière personnalisée pour chaque client. Cette équipe propose une large gamme de produit preuve d’une grande vitalité et de créativité : Casseroles, calebasses, louches, couverts, verres, chaudron, bijoux, sculpture…

Les artisans fondeurs du Quartier Ndangué Ed-Ville

Autre chose: ils sont fiers d’afficher leur appartenance tribale banda. Cela ne pouvait que flatter mon égo.

Si beaucoup de ménage de la diaspora brandissent fièrement leurs casseroles, c’est grâce à ses besogneux confinés dans l’anonymat. Il serait temps de leur donner une meilleure visibilité. J’espère qu’en parlant un peu d’eux, nos responsables pourront prendre en compte ce formidable réservoir de potentialité. Car si c’est aussi une vraie satisfaction pour Laurent de localiser un artisanat dans son quartier, il s’agit cependant d’un artisanat sans possibilité de devenir une industrie alors que le savoir-faire est là.

Un jour, de passage dans un coin privilégié de la capitale, j’avais surpris un bout de conversion où il était question d’un quartier des laissés-pour compte du bout de la ville. Il s’agit du quartier « Combattant » celui qui jouxte le quartier « Ndangué » où j’ai en partie grandi avant de m’expatrier. J’étais sidéré et consterné devant tant de mépris de la part de gens qui n’ont rien fait pour mériter leur statut. Ceux qui ont consacré l’échec de leurs concitoyens par une gestion calamiteuse et égoïste de leur responsabilité.

Voilà pourquoi, je parle aujourd’hui de l’autre versant de la réussite : de ceux qui, contrairement aux privilégiés précités, partent de rien pour s’occuper ensuite des autres sans jamais rouler sur l’or.

À très bientôt.

Stanislas Banda
Inji balé, Ocho balé
Uzu balé, ama balé

RE-CONNEXION AVEC LA LANGUE NATALE !!!

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Je m’efforce de ne pas être l’otage de l’actualité des médias internationaux. Avant tout, je vais dire une chose pour éviter toute équivoque. Tous les peuples qui sont en souffrance sont de facto de cœur avec ceux qui les rejoignent en cours de route. Nous, peuples du sud, savons mieux que quiconque ce que c’est d’être dans l’endurance, la torture, le désespoir sous le regard éploré et perfide des autres. Nous regrettons de ne pouvoir aider car nous sommes nous-même dans un dénuement absolu. Nous n’avons pas les moyens disproportionnés des peuples du nord. Je n’ai rien d’autre à rajouter.

Cela fait un bout de temps que je ne vous ai pas parlé de la langue banda. Il
y a quelques mois, j’avais commencé à opérer mon immigration vers l’Afrique. Il ne s’agissait pas d’un reflet de la thèse identitaire ambiante. Il est juste question du retour d’un voyageur, d’un explorateur qui a fini ses périples et qui rentre chez lui pour retrouver les siens. Ce voyage a été l’établissement
d’un pont entre deux réalités qui sont miennes dorénavant. Car né en Afrique, je me suis réalisé en tant qu’homme ailleurs. Cela a été une merveilleuse aventure.

Ailleurs ce qui m’a le plus manqué, c’était ma langue tribale.

Retrouver la terre de mon clan a été vital. J’y ai recouvré cette manière exquise et lyrique de parler ma langue ancestrale. Je ne la parle pas comme il le faudrait mais elle me semble si naturelle, cette émanation de notre spiritualité, qu’un rien de son ruissellement suffit à mon bonheur.

Ce voyage a mis fin à mes interrogations diasporiques et à mes élucubrations
d’émigré. Par moment, je ne vivais plus l’ailleurs comme une richesse mais
plutôt comme un exil avec son cortège d’acculturation. Pourquoi ? Parce
que l’ailleurs commençait à me vider de ma substantifique moelle. Sur ma route, j’ai croisé le français, l’anglais, le russe, le portugais brésilien, le créole.
J’ai encore et toujours des réminiscences de ces langues dans ma caboche. Alors que la langue banda n’a quasiment plus de périmètre vie dans mon être, faute de pratique, faute de rencontre. Parce que ma condition d’expatrié me permet de rencontrer beaucoup plus d’anglais, de russes, de portugais que de banda.

Voilà pourquoi, en réponse, j’avais commencé depuis quelques années à travailler sur la question de cette langue banda. Face à l’hégémonie des autres langues, il me fallait sacraliser la nôtre porteuse de l’histoire et de la culture banda. Nous devons donc la parler au quotidien pour pouvoir la préserver.

Vous comprenez alors que mon voyage-retour devenait inéluctable.

Une fois sur place, le danger dont je soupçonnais l’existence est bien réel et bien plus critique que ce que je croyais. Je vais être précis. Ce que je vais
avancer comme constat ne concerne que Bangui et sa périphérie.

 Car je n’ai pas pu me rendre beaucoup plus loin à l’intérieur du pays. Cela m’a été déconseillé fortement car le pays n’a toujours pas retrouvé sa stabilité
sécuritaire. Il ne s’agit cependant pas d’une insécurité permanente. Il y a de
la circulation. Le danger est aléatoire. Comme quand on se rend d’un bout de Paris à l’autre, ou quand on traverse tout Marseille, nul ne peut présager de la suite. En tout cas, je n’ai pas tenté le diable car mon agenda était
débordant de toute façon.

 Bien entendu à Bangui, j’ai trouvé, avec bonheur, des personnes locutrices banda. Il s’agissait très souvent de personnes soient âgées, soient déplacées, ou les deux à la fois. Un déplacé se retrouve à la capitale pour cause d’insécurité régionale et autres. La plupart des ressortissants banda parlent de moins en moins leur langue au quotidien ; les autres sortent à peine quelques mots ou n’ont qu’un discernement linguistique apathique sans pouvoir utiliser la langue.

 La raison est depuis longtemps connue :

L’idée d’une communauté nationale, dans l’esprit des colons et de l’administration gérée par leurs vassaux autochtones, ne pouvait se conjuguer avec la pratique des langues tribales. Du coup notre école républicaine a été le goulag de nos langues régionales en nous proposant d’autres langues et en contribuant à l’éradication programmée des nôtres. L’équarrissage de nos langues s’est opéré méticuleusement.

En faisant le tour des jeunes de ma famille et des alentours, j’ai compris les
responsabilités qui m’incombaient et l’obligation de poursuivre mon travail sur la langue banda. À Bangui, j’ai mis en place une petite équipe de travail. En plus de superviser nos travaux sur le parler banda, mon profil d’ânonneur fait de moi un parfait cobaye pour les différentes études.

En trois mois, j’ai réalisé plus qu’en quarante ans.

Je suis en France en ce moment. Je travaille sur les matériaux linguistiques ramenés de Centrafrique. La masse de travail est énorme. Mais je dois avancer très vite car j’y retourne dans quelques mois. Oui, il s’agit d’un retour progressif. Ces voyages aller-retour constitueront un sas de décompression pour moi. Car il est question de réadaptation climatique, sociologique, culturelle, de me réconcilier, de trouver d’autres repères, d’autres réseaux, de changer de logiciel, de retrouver l’essentiel etc…

Concernant la démarche collective, je me suis assagi depuis car l’urgence du pays se trouve ailleurs. Mais à mon niveau personnel, l’impératif reste d’actualité. Je dois non seulement poursuivre ce travail mais préparer la jeune génération à le perpétuer et c’est en bonne voie. Car le réveil national, régional, tribal, clanique sera douloureux, très douloureux.

 Pour illustrer, ma pensée, je vais vous relater une situation vécue : J’ai croisé de belles personnes dans une belle région luxuriante (la photo) avec un regrettable, dommageable et malavisé penchant, elles abattaient tous les arbres, mêmes centenaires pour en faire du charbon de bois. Affolé par cette pratique, je leur fais part du souci écologique de leur comportement. Je n’ai reçu qu’une réponse narquoise me signifiant que je n’avais pas encore pris la mesure de leur réalité. Puisque je vais m’installer dans ce coin, j’en prends fait et cause.

 Traduction : Il est erroné de croire qu’il y ait un gardien du temple culturel, qui doit veiller sur notre sacro-saint berceau banda, le protégeant envers et contre tous, qui, quand le jour viendra, remettra aux survivants la clé du sanctuaire tribal laquelle ouvrira des portes nous dévoilant nos trésors engloutis. Ce que je dis reste valable pour toutes les autres tribus.

Ce que j’ai vu en Centrafrique, m’incite à plus de circonspection. Nous devons tous agir avec réserve autant dans nos actes que dans nos paroles. Personne n’est chargée de garder au chaud quoi que ce soit pour qui se soit en Centrafrique. Ce qu’il faut comprendre : il n’y a pas de préposé au gardiennage de nos propriétés, de nos entreprises, de notre culture, de notre écologie, de la famille et autres. Il ne faut pas croire qu’il faille seulement rentrer et mettre les pieds sous la table. Nenni !!! Il est question ici de responsabilité collective à travers l’engagement de chacun.

Conficius disait : « Il faut d’abord faire ce qui nous coûte, ensuite ce qui
nous plaît. C’est la vertu de l’humanité. »

 Pour finir, j’ai constaté que les anciens étaient de moins en moins âgés en
Centrafrique. Leurs souvenirs remontent à peine aux indépendances. Je n’ai
relevé aucun endroit dédié à la mémoire, et donc quasiment aucune traçabilité historique. Un soir, dans le fameux village cité plus haut, inconsciemment comme un enfant, j’attendais quelque chose et visiblement les plus jeunes aussi.  J’ai mis un peu de temps à comprendre qu’ils attendaient qu’un ancien s’adresse à eux. J’avais juste oublié que je faisais dorénavant partie des anciens. J’ai pris mes responsabilités. Je me suis donc retrouvé, moi, venant de France, à raconter des contes centrafricains dans un village le soir, autour du fameux feu de bois. Les enfants, mais pas qu’eux, les adultes aussi, écoutaient. À la fin, ils m’ont supplié de remettre cela le lendemain. Ils m’ont dit que ce moment-là n’existait plus dans le village. J’ose espérer qu’il ne s’agisse que de leur cas. Mais la vraie question, c’est :  Qui transmettra quoi ? Comme dirait mon cher cousin : À méditer.

 À très bientôt.

Stanislas Banda
Inji balé, Ocho balé
Uzu balé, ama balé

Suspension provisoire de mon portail numérique!!!

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Cher(e)s ami(e)s,

Je suis au regret de vous informer de la mise en sommeil temporaire de mon site SingoBingo@rt.

Mes raisons sont les suivantes :

  • Je vais opérer, dans quelques heures, une migration continentale pour une immersion et une re-connexion avec ma langue tribale.
  • Le contexte de la diaspora m’a fait jusqu’à présent réfléchir de l’extérieur. Cela a été, certes, une belle expérience intellectuelle, mais il me paraît honnête aujourd’hui de le faire de l’intérieur. C’est plus juste. Un compatriote centrafricain, m’a dit, il n’y a pas si longtemps, « Mais qu’est-ce que tu vas foutre là-bas ?  « Je me suis alors posé la question « Mais qu’est-ce qui peut engendrer un tel désamour avec la terre-mère ? ». Et en y réfléchissant de plus près, je me suis rendu compte qu’il s’agissait d’un syndrome guettant toute la diaspora. Je comprends mieux pourquoi mes différents appels du pied à la mobilisation culturelle ne prenaient pas. La diaspora, à force de ruminer et à juste titre, a fini inexorablement par détester sa terre, son peuple, sa race, nos tribus, sa famille, ses amis, ses dirigeants. Je n’en suis pas encore là.  J’espère.
  • Nos premiers penseurs, africains, noirs, nous avaient ouvert la voie, celle de l’émancipation. Ils nous ont permis de comprendre le martyr de nos anciens en tant que colonisés et esclavagisés. Qui sommes-nous depuis les indépendances? Que sommes-nous devenus ? Des indépendants, diront certains mais en réalité, des majeurs sous tutelle, une situation pas plus enviable. Et récemment, la jeunesse africaine lors du sommet « Afrique-France » a été adoubé en « colonisée et esclavagisée 2.0 ». L’occident nous le rejoue cette fois-ci ala « Complexe d’Œdipe ». C’est-à-dire « Tuer le père ». Macron a juste signifié à cette jeunesse africaine, si tu me désires, tu dois tuer ton père ». C’est ainsi, qu’ils ont mis à mort le père (les chefs des États africains, les mêmes hier encore amis de la France). Comme cela a été avec Kadhafi. Ce rituel n’a pas changé. Mais à mon avis, cette jeunesse s’est trompée de père, celui qui empêche notre émancipation. Est-ce étonnant ? NON. Car depuis les indépendances tous nos penseurs l’ont été avec la langue du colonisateur. Peut-on se considérer libre avec la langue de l’Autre ?
  • Voilà pourquoi, j’ai donc besoin de retrouver une authentique énergie, radicale, exsangue des miasmes des violences passées.
  • Si votre maison brûle, ne perdez pas de temps à aller chercher l’aide des voisins. Faites ce que vous avez à faire. S’ils se rendent compte que votre maison brûle, ils viendront peut-être vous donner un coup de main. Je veux dire par là, que jouer collectif pour un africain aujourd’hui semble encore difficile et c’est à la hauteur de son traumatisme subi. Sans oublier son syndrome du Stockholm.
  • J’ai aussi compris que la diaspora est productrice d’un rêve démobilisant et destabilisant pour la jeunesse africaine subsaharienne. Celle-ci a fini par interpréter que réussir c’est être en occident. Car nous, de la diaspora, n’arrêtons pas de délivrer aux nôtres de faux signaux. Mais cette jeunesse ne sait pas que le prix à payer est son propre reniement. Il faut donc corriger notre induction.
  • Ma pensée actuelle est : DON’T FEED THE TROLL. Elle peut avoir plusieurs traductions. Pour ma part il s’agit de ne plus être mobiliser par les faux problèmes. Je ne veux plus, je ne peux plus accorder la moindre attention à la propagande ambiante. La diaspora vit dans un environnement énergivore et souvent pour de mauvaises raisons. Voilà pourquoi j’ai envie aujourd’hui de re-mobiliser mon énergie pour une juste cause mais auprès des miens, en ayant pied sur ma terre. En souffrant ensemble avec les miens, en bâtissant ensemble, en cherchant ensemble la porte de sortie, en profitant ensemble de nos petites réussites et en mourant ensemble.
  • Je vous remercie de votre compréhension.

J’espère revenir vers vous avec une vision nouvelle et surtout porteuse d’émancipation.

À bientôt.

Djomoka Banda Yackpa

Saupoudrage culturel !!!

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Considérez cet article comme une suite à « Le cimetière des artistes africains ».

Je tiens à dire une chose avant tout. J’ai plein d’amis africains adeptes de la
musique urbaine africaine. Certains, peu, ont aussi une connaissance de la
musique traditionnelle africaine. Je plébiscite la musique traditionnelle
africaine et j’aime aussi certaines musiques urbaines africaines. Mais dans
l’acception généralisée, le terme de musicien africain s’adresse d’emblée au
musicien urbain. Le nœud du problème se pointe quand celui-ci se positionne
comme représentant le monde traditionnel, en s’exprimant en leur nom.

Parce que quelques fois, il va emprunter à une ethnie, un riff, un pattern rythmique et il enfume tout le monde en faisant croire à de la musique africaine. Le tout encadré par un logiciel générant en boucle psychotique un insipide logarithme musical dédié avant tout à une configuration occidentale.

La plupart d’entre eux n’a jamais appris ni joué auprès d’un ancien.

La seule et vraie question à se poser :

       Comment peut-on véhiculer une culture qu’on n’a pas appris ?

Ce musicien-là transfert son affect culturel dans son nouvel environnement
occidental. Cela veut dire qu’il arrive avec des émotions qui modifient
absolument ses capacités à distinguer ces nouvelles réalités. Voilà pourquoi de
représentation erronée en mauvaise interprétation, il ne fera que se dévoyer.  

La situation du musicien africain est grave car en tant qu’artiste il ne perçoit
essentiellement qu’avec son cœur, comme la majorité des artistes par ailleurs.
La raison l’habite très peu en plus du fait de sa méfiance prégnante, héritage
de tout ce que son histoire (esclavage, colonisation) lui a fait subir comme traumatisme.

Donc en contact avec d’autres cultures, l’artiste africain se sent acculé. En effet, quand deux cultures se croisent, les présentations sont de rigueur. Et c’est ainsi que notre artiste africain essaiera de reproduire une image supposée d’une culture africaine qu’il n’a jamais apprise.

En esquissant deux pas d’une danse tribale, en chantant deux phrases dans une langue non-parlée au quotidien, en égrainant une banale gamme de do majeure (loin de sa pentatonique ancestrale) sur une guitare électrique (puisqu’il ne sait jouer d’aucun instrument traditionnel), le musicien africain en occident créé de l’illusion culturelle. Il saupoudre son insipide production d’un faux ingrédient d’africanité et le tour est joué. Avec la complicité de son éternel public non exigent.

Les accords qui découlent de leurs arrangements musicaux sont systématiquement ceux de l’harmonisation d’une rebattue gamme
diatonique majeure. Jamais un peuple n’a enchaîné autant la sempiternelle
boucle de deux mesures de Do-Fa-Sol7 ou Sol-Do-Ré7…

Jamais on ne retrouvera l’harmonisation de la gamme pentatonique de leurs anciens. Seuls ceux des villages les utilisent au quotidien.

Quand ils sont acculés dans la cité urbaine ou lorsqu’ils doivent se confronter aux autres cultures, comme des vautours, on les voit roder autour des anciens en quête d’inspiration ou pour tout simplement piller des valeurs qu’ils ont toujours minorées.

Je vais vous parler de l’exposition universelle pour que vous saisissiez l’ampleur du désastre.

L’exposition universelle

La motivation première de l’exposition universelle en Europe était l’éducation des visiteurs occidentaux. C’est sous ce prétexte là que nos anciens avaient été exhibé dans ce qu’on a appelé « Zoo humain ». Pratique infâme en direction du peuple noir dont nous portons encore aujourd’hui les stigmates. La théorie de l’évolution de Charles Darwin assurait à l’exposition universelle un vernis scientifique (le plus fort éliminera le plus faible et ainsi la sélection naturelle se fera). Il fallait exhiber les faibles pour se sentir fort enfin.

On a parlé un moment d’industrie du spectacle qui s’approvisionnait en matière première humaine dans les colonies. Nos anciens ont été exhibés selon les attentes de la gloutonnerie Occidentale. Le blanc veut se goinfrer de sauvage, de cannibale, de sous-homme, d’indigène, de spécimen, d’animaux…

Après  cette hyperphagie de l’occident, seule une anorexie passagère viendra pour un temps au secours de nos aînés. On commença alors à parler de l’échec de la mission civilisatrice de l’Occident malgré le gros appétit du public occidental pour ce genre de spectacle.

Mais c’était sans compter le cinéma. Celui-ci avait repris la main pour projeter des images de sous-civilisés.

L’exhibition du noir devient de plus en plus subtile. La télévision occidentale devient elle aussi, un grand vecteur de cette exposition, pour un public complaisant.

Et voici un autre élément de réflexion

Aujourd’hui, et c’est là l’objet de ma colère, la gestion du spectacle nous a été refilé. J’avais écrit un temps : « Le spectre du danger qui amplifie notre péril n’est pas ténu. Il s’est plutôt affiné avec une palette infinie de propositions. Il est dorénavant subtil : Nous ne sommes plus directement menacés par le conquistador. Celui-ci nous a gracieusement fait cadeau de son mousqueton. Et depuis, on s’étripe pour savoir qui sera le meilleur serviteur du maître ». 

Épilogue

Tout comme l’exposition universelle dont on exècre la pratique, l’africain se met lui-aussi à exposer les siens. Depuis quelques temps, cela consiste à aller dénicher des artistes de nos tribus et à les soumettre à diverses formes d’exploitation : Certains exploitants viennent de l’Occident pour les étudier, encore et encore. Quand on gratte un peu, on découvre qu’ils viennent s’offrir une visibilité à moindre coût.

Déjà en temps normal, l’artiste traditionnel africain peine matériellement à se rendre dans la capitale de son pays. Devinez sa réaction quand il se voit offrir gracieusement un billet d’avion pour l’Europe. Va-t-il pouvoir résister au coca-cola, au McDo, à la casquette de baseball ? Non. Ces choses-là ont déjà fait qu’une bouchée de nos enfants en Europe. Alors pour un blédard africain (avec tout mon respect) !!!

Voilà comment cela se passe : On demande à des artistes traditionnels de
s’adapter à un projet sans le consentement de la tribu, de ne plus être
eux-mêmes. « Installe-toi là, regarde par-là, joue comme ceci… »

Bien entendu, ils vont revenir avec un casque audio, comme seul gain de leur expédition au « Kong haut », qu’ils porteront dans un improbable environnement de la savane africaine. Ils raconteront à leurs enfants leur voyage à Vingt mille lieux sous la terre à bord du métro.

Les nôtres deviennent à nouveau des bêtes de foire et cette fois avec notre assentiment, celui de nos gouvernances qui n’y trouvent rien à redire. Il ne peut rien être reprocher toutefois à ses derniers car ils n’ont pas l’occasion réflexive de la situation. Ils ont d’autres urgences.

Salut Maître, ceux qui vont s’humilier te saluent

(Avē Cæsar, moritūrī tē salūtant)

Voilà ce qui se joue. C’est très moche. Nous sommes au XXIème siècle. Il y a quelque chose à faire mais cela va prendre du temps.

Mais déjà en parler donnera à réfléchir aux futurs apprentis-négriers 2.O !!!

À bientôt.

Stanislas Banda
Inji balé, Ocho balé
Uzu balé, ama balé

Abonné absent !!!

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Les miens sont aux abonnés absents en Centrafrique. Compliqué et acrobatique de les joindre téléphoniquement depuis la charge avortée des groupes armés à la porte de Bangui. Je repense à cette expression qui circulait encore il n’y a pas si longtemps : « Bangui doux ».

Il est difficile de croire aujourd’hui qu’en tant qu’hommes libres nous nous obligeons encore à une obéissance irrationnelle…

Il n’y a qu’une chose qui peut expliquer cet asservissement : Notre premier homme politique nous avait annoncé notre libération en ces termes :

« Ô Centrafrique, ô berceau des Bantous ! Reprend ton droit au respect, à la vie ! Longtemps soumis, longtemps brimé par tous. Mais dès ce jour, brisons la tyrannie. Dans le travail, l’ordre et la dignité, tu reconquiers ton droit, ton unité… »

Et depuis nous sommes devenus inconsciemment les obligés des politiciens. Nous sommes reconnaissants envers le politique de son grand discernement pour nous avoir libérer. Nous lui avons accordé en temps et lieu tous les droits. Après tout, a-t-on besoin de réfléchir, il peut penser à notre place.

Ainsi, nous avons servi des gouvernements tyranniques. Qui n’ont offert aucune visibilité, aucun espoir à sa jeunesse. Une jeunesse en proie à la pauvreté chronique, au sida, à la cruauté des groupes armés…

Notre ennemi a dorénavant deux visages : celui de l’étranger mais aussi celui plus inquiétant d’un proche.

Nous de l’extérieur, de la diaspora, nous crions « « Ô Centrafrique, Ô mon amour » pour donner le change à ceux qui s’empressent ici de retrouver encore en nous une preuve de leur grandeur passée ; et pendant ce temps à l’intérieur, quatre millions des nôtres astiquent le cuir de la servitude. Par ci et par là, tout le monde est prompt à défendre un bilan négatif afin de ne pas s’attirer la foudre du maître. « Demain serait meilleur ».  

Du coup, les seuls qui veulent un changement sont les grands « saigneurs », les brigands de grands chemins. Quel paradoxe.

« Ô Centrafrique, ô berceau des Banda! Cela fait 600 ans, 60 ans et 6 ans que tu attends de reprendre ton droit au respect, à la vie! Longtemps soumis, longtemps brimé par tous. Encore aujourd’hui, tu n’as toujours pas brisé la tyrannie. Sans le travail, l’ordre et la dignité, tu n’as toujours pas reconquis ton droit, ton unité… »

 À bientôt.

Stanislas Banda
Inji balé, Ocho balé
Uzu balé, ama balé

Bonne année 2021 !

CopyrightBangui2012StanislasBanda

Nous sommes le jour un de l’année 2021 !

Je souhaite à tous mes lecteurs « BONNE ANNÉE ».

Ma première pensée est de réitérer l’idée de ne pas oublier son histoire, de ne pas relativiser la pauvreté, de ne pas méjuger la souffrance.

De ne surtout pas donner un chèque en blanc à nos responsables politiques.

À ceux-là, il leur faut, votre liste de courses. C’est notre seul système d’évaluation.

Refusez de cohabiter avec vos tortionnaires. Ne laissez personne décider de votre liberté.

« Que faire ? », « Que fait-on ? », « Qu’est-ce-que tu proposes ? »

Voilà quelques questions qui m’ont interpellé en 2020. Elles renvoient toutes à la désespérance, à l’impuissance. J’ai souvent été surpris parce que venant de personnes équilibrées. Quelques fois, ces questions m’étaient quasiment adressées de manière agressive ou détournée car je dérangeais le confort intellectuel de certains. Beaucoup ont baissé les bras, me suggérant l’idée du « Qu’il n’y a plus rien à faire » ; « Que le monde ne changera pas » ; « Que le monde est détenu par de puissants lobbys qui ne laisseront pas le cours des choses changer ». Je n’oublie pas non plus le camp des « Laisser voir venir », l’autre fer qui entrave nos chevilles.

Voilà la réponse que j’opte dorénavant, pour ceux qui veulent rester debout et avancer : « Chacun fait ce qu’il a à faire ». Pour les autres, sauf à leur dire « restez coucher, tout va bien », je n’ai rien d’autres à rajouter. Pour mes amis qui sont dans le doute et ou qui sont dans des mauvaises passes, je reste indéfectiblement disponible.

Heureusement que nous sommes encore un certain nombre à interroger notre environnement et en quête de solutions. Réfléchir et réaliser afin que la Centrafrique puisse sortir de son classement parmi les nations les plus pauvres au monde. Réfléchir et réaliser pour que la jeunesse centrafricaine s’autorise un autre rêve que celui d’un autre ailleurs. Enfin réfléchir et réaliser pour donner un horizon dégagé au peuple banda et à toutes les autres tribus centrafricaines.

Avant de finir, je voudrais juste préciser que mon discours, ne s’inscrit uniquement que dans une vision de la sauvegarde de nos patrimoines culturels.  Je ne pense pas à l’aune du Bangui politique. Je suis porté uniquement par la question du territoire banda et de son patrimoine. Par lâcheté certains d’entre nous ont choisi le statu quo. Cette année, je vais renoncer à convaincre les indécis. Cela use beaucoup trop d’énergie. Nous banda, devons faire face à un univers de plus en plus hostile. Aujourd’hui, ceux qui n’ont pas appris leur leçon, ne l’apprendront jamais.

Tout seul, je n’arriverai à rien. Voilà pourquoi je sollicite encore et encore la collaboration et la participation de tous les banda « debout ».

Ma photo représente le « Douké », le foyer, l’âtre centrafricain. Je l’ai prise en 2012 (il y a presque 9 ans donc) à Bangui.

Je vous remercie pour la fréquentation du site.

Bonne année 2021 !

 À bientôt.

Stanislas Banda
Inji balé, Ocho balé
Uzu balé, ama balé

Bambari libéré !!!

CopyRight2020StanislasBanda

Discours du 25 décembre 2020 d’’inspiration gaullienne.

« Pourquoi voulez-vous que nous dissimulions l’émotion qui nous étreint, nous qui sommes ici et là-bas à regarder Bambari se faire libérer. Bambari !
Bambari outragé ! Bambari brisé ! Bambari martyrisé ! mais Bambari
libéré ! libéré par …, par…, disons avec l’appui de l’ONU et le concours du
Président Macron qui se bat seul pour la vraie Centrafrique et la France
éternelle.

Eh bien ! Puisque l’ennemi qui tenait Bambari a capitulé, et si tout ce monde
rentrait chez lui, qu’adviendrait-il de Bambari ? »

Au fait de quel ennemi s’agit-il ? Ne fut-il pas invité à la grande
table ? Malgré l’atrocité des actes terroristes passés de ces groupes
armés sur le territoire banda, un territoire national, ne les avait-on pas
conviés à partager l’avenir tout en effaçant l’ardoise ?

Aujourd’hui, qu’y a-t-il de plus grave que les atrocités passées pour que l’invité de marque ne puisse plus trouver grâce aux yeux de … ? Mais aux yeux de qui au fait ?

Si maintenant, l’idée d’une alliance est insupportable, pourquoi juste repousser le démon aux portes de Bambari ? La mise en danger du reste du territoire banda paraît dorénavant évidente. Comme il l’a déjà fait, cet ennemi là va déverser sa lâcheté sur les autres pauvres villages banda, sous les habituelles manifestations d’attendrissements hypocrites.

Qui en porterait la responsabilité ?

Nous sommes bien dans une boucle temporelle.

 À bientôt.

Stanislas Banda
Inji balé, Ocho balé
Uzu balé, ama balé

Élection présidentielle centrafricaine de 2020

CopyRight2020StanislasBanda

En dépit de mon éloignement des questions politiques, j’ai un avis politique. L’élection présidentielle 2020 en Centrafrique est un acte démocratique dans le cinquième pays le plus pauvre du monde. Quand on devise d’élection en Centrafrique, j’ai toujours cette impression de me retrouver dans le film «Groundhog Day» Un jour sans fin. Le pays semble bloqué dans une boucle temporelle forçant les centrafricains à revivre indéfiniment cette péripétie sans lendemain. Un « Time Loop » qui lie inexorablement l’avenir de ce pays à son passé désastreux. Une boucle de causalité qui nous maintient fermement prisonniers.

Devenant ainsi une référence culturelle, le centrafricain choisit son dirigeant sans obligation de résultat.

La démocratie permet, théoriquement, l’exercice d’une pleine liberté citoyenne. Quand elle est pratiquée sous menaces diverses et sous assistanats, le peuple devrait conditionner sa voix. Si malgré tout, le peuple valide la participation des « toujours les mêmes » pour perpétuer la tradition politique, alors il devra accepter sa condition en toute responsabilité.

Voilà pourquoi être la 5ème nation la plus pauvre du monde ne semble pas être insupportable à vivre.

Aujourd’hui, je comprends mieux pourquoi le 1er de la classe est toujours en pleine détresse quand il se retrouve déclassé en 2ème ou 3ème place.
Car quand on est dans le peloton de tête, il y a un standing à préserver. On
cherche plutôt à être dans les « échappés ». Ce qui n’est pas le cas des derniers qui n’ont plus de rêve.

Mon avis est relatif car j’estime que l’élection présidentielle intéresse avant
tout les personnes vivant sous le toit Centrafrique. Je ne peux pas me
positionner sur quelque chose que je ne comprends pas.

Replaçons les éléments dans un contexte analysable et hors émotion partisane :

La population de Centrafrique vit sous le seuil international de pauvreté. La
Centrafrique occupe, selon l’indicateur, la 5ème place des nations les plus pauvres au monde. Cela fait mal. Ne pas avoir de rêve, de vision dans cette
conjoncture, relève de sortilège, de malédiction auquel cas, il faudrait faire appel à un rebouteux républicain démocrate.

Ma seule interrogation concerne la conséquence de ce Time Loop sur la culture banda avant tout et bien entendu sur les autres cultures ethniques. Il
est dit que 2/3 du pays seraient hors contrôle. Malgré la présence de l’armée
et des partenaires militaires de la Centrafrique, la peur semble campée
toujours du même côté. L’exercice démocratique dans ces conditions me paraît douteux mais incontournable :

Nous sommes bien dans une boucle temporelle.

 À
bientôt.

Stanislas Banda
Inji balé, Ocho balé
Uzu balé, ama balé

Mon banda ne convoque pas la Centrafrique!!!

Auguste Ngwadédé catéchiste dès 1920 à Saint-Joseph de Bambari.

Quand je parle de la culture banda, ma démarche a pour ambition de mettre en place un schéma de référence pour la réhabilitation culturelle en territoire banda.

Il s’agit pour moi de rendre visibles nos diversités esthétiques et donc ethniques. Il est vrai que je ne parle essentiellement que de l’ethnie banda. Normal, je suis banda. Je n’ai pas la légitimité pour parler des autres ethnies. Mais ma pensée s’adresse à toutes les ethnies sans façon du fait de notre communauté de destin. Ma vision est la sauvegarde du patrimoine car l’enjeu est autant culturel, éducatif qu’économique.

Au moment du déclenchement de ma campagne pour le banda, j’étais persuadé que les miens, les banda répondraient à cet appel d’air. Malheureusement ma proposition n’avait pas agrégé. J’ai voulu en savoir plus sur ce scepticisme ambiant.

Il en ressort que la majeure partie des retours des banda et d’autres ne pouvait s’analyser qu’à travers le prisme de la politique. Un conflit de loyauté qui objective le dilemme que les miens ont à choisir entre la république et la tribu. Nous sommes donc en présence d’un syndrome d’aliénation politique. Ils entretiennent avec la république une complicité aliénante qui les oblige à désavouer leur marqueur identitaire. La république fait peur à ses enfants. La chose du peuple (Res Publica) ne leur appartient plus. Si tant est qu’elle ait pu leur appartenir un jour.

Moi, je n’ai pas de dettes par rapport à cette république. Celle-ci fonctionne sur notre défaillance tribale.

Mon discours sur le banda ne convoque en aucun cas la Centrafrique politique. Pour la simple raison que je ne suis pas politicien. Beaucoup des nôtres y sont déjà assez embourbés pour que je vienne grossir leur rang. Une république qui est devenue le cimetière de toutes les bonnes volontés.

La république centrafricaine, l’empire centrafricain, le territoire de l’Oubangui-Chari sont postérieurs à la nation banda.

Pour le dire autrement, la nation banda a préexisté à ces entités.

Le centrafricain a été tour à tour sujet du territoire de l’Oubangui-Chari, citoyen de la république centrafricaine, de l’empire centrafricain. Une versatilité qui donne à réfléchir. Dans toute cette errance centro-africaine, seule l’appartenance à notre ethnie banda a constitué une permanence pour nous banda.

Si la république centrafricaine est une construction intellectuelle, la nation banda répond quant à elle à l’essentialisme.

Bien que nous en fassions partie, la Centrafrique n’est pas déterminante dans l’identité du banda. Tant que le banda le pensera, il restera prisonnier à jamais.

Le contrat entre la République et les régions représentant nos ethnies n’a pas été respecté par la République.

Ce que je dis pour la Centrafrique politique, l’est aussi pour les religions dominantes en Centrafrique. Aucune de ces religions n’est déterminante pour l’identité banda. Tout banda qui le pense, restera prisonnier à jamais. D’ailleurs à ce propos, le banda n’a pas à faire le sherpa des autres religions. C’est cette lâcheté là qui nous interdit l’idée d’une réparation des offenses que nous avons subies. Oui, car certains pensent que réclamer préjudice serait faire offense à leur nouveau dieu. HONTE à eux. Car tous les autres dieux s’autorisent sans vergogne dorénavant à venir recruterer leurs ouailles chez nous car nous banda ne savons plus rendre hommage à notre Dieu, Yilingu, Eyingeren. Changer d’état nécessiterait de couper le cordon ombilical. Seul un initié banda comprendra d’emblée mes propos. En effet, en rentrant dans le bada, le but est d’en ressortir nouvel homme. On perd le prépuce dans la souffrance pour pouvoir faire partie des bâtisseurs de la nation banda. Oui, aujourd’hui, les non-initiés devraient se débarrasser de leurs verrues confessionnelles pour leur Dieu originel. Ne pas le faire transcrit notre degré d’aliénation.

Le faire permet de reconsidérer sa place au chevet de cette république moribonde. En ce qui concerne le confessionnel, je m’en tiendrais là car je ne suis pas croyant.

Être banda est un honneur. J’ai eu des soirées au bonheur infini sous le firmament du natal à écouter grand-mère nous conter. De cette histoire que beaucoup connaisse. Et pourquoi aucun d’entre nous ne se lève pour la résistance ? J’ai voyagé, j’ai vu et je sais désormais que nous pouvons y arriver. Cela ne dépendra que de chacun. Pour cela chacun devra consentir à son sacrifice et redonner au Ngango, au Péké, à Tèrè, à Yilingu … la place qui leur revient de droit.

La coutume qui présidait au mariage de mes parents en 1955 était le Banda Yackpa. Le colon Mauvais Paul de son nom, le blanc qui gérait notre colonie avait validé administrativement cette information à propos de notre coutume. Parce que cette appartenance tribale sonnait comme une évidence.

Notre pays n’a accédé à son indépendance qu’en août 1960. Pourquoi aujourd’hui, le banda a cette trouille de se reconnaître dans l’appartenance de ses grands-parents alors que le colonisateur se sentait l’obligation de la mentionner ?

Pourquoi, pourquoi, pourquoi ?

J’avais eu un très grand plaisir à faire découvrir à ma mère certains monuments historiques de France. C’est à ce moment que je me suis rendu compte de la pauvreté du sango langue nationale centrafricaine à dater des évènements au-delà de 100 ans. Cela est dû au fait que l’on n’a aucune référence historique, culturelle, géographique pour signifier la durée du temps. Nous n’avons pas assez de recul historique. Aucune traçabilité en soutien à notre savoir. Aucune transcription dans nos multitudes de langue des évolutions de l’humanité.

J’ai compris à ce moment là qu’apprendre dans la langue de quelqu’un d’autre condamnait à la disparition de l’héritage linguistique de nos ancêtres.

Maintenant, vous l’avez compris… Si vous ne faites pas de place dès à présent à la langue banda, il en ira de la responsabilité de chacun comme de moi-même.

Je réunis tout ce qui me paraît indispensable de porter à la connaissance des futures générations, pour que nos enfants et nos petits-enfants les découvrent et apprennent à les connaître, les comprendre, les approfondir, se forgeant ainsi un socle culturel leur permettant de s’ouvrir au monde sans perdre leurs origines.

Plus tard, ils sauront le rôle que nous aurons joué dans la sauvegarde ou la disparition de notre patrimoine.

J’écrivais il n’y a pas si longtemps que la langue banda est l’héritage essentiel des banda et que nous avons tous une responsabilité personnelle à son égard.

Comment expliquer alors qu’après 10 années d’étude de médecine, que tout ce savoir ne puisse être transcrit dans notre langue le banda. Plus de 5 ans d’étude après le bac, aucun architecte ne peut expliquer l’architecture dans la langue banda. Ce constat reste valable pour les autres corps de savoir : mécanique, musique, mathématique, physique, philosophie, chimie… Certains d’entre nous peuvent aujourd’hui jouer avec la théorie quantique sans pour autant cependant pouvoir énoncer dans notre langue le simple théorème de Pythagore. Nous ne savons toujours pas dire en banda cette formule qui est apparu en Centrafrique il y a une soixantaine d’année : « Dans un triangle rectangle, le carré de l’hypoténuse est égal à la somme des carrés des deux autres côtés ». Il est dit que, lorsque l’on connaît ce théorème et sa réciproque, on va pouvoir : calculer des longueurs, calculer des angles, démontrer que le triangle est rectangle.

Et c’est ici qu’apparaît le noeud gordien : Ceux d’entre nous qui maitrisent notre langue ne sont pas en mesure de traduire des concepts de base tels que la longueur, l’angle, le triangle, le rectangle, le théorème, l’hypoténuse… Donc il est vain de se gloser en se targuant de parler une langue qui a perdu sa capacité à transcender son locuteur. Il serait donc difficile de convaincre la nouvelle génération d’adopter cette langue sur le seul justificatif quelle serait porteuse de notre histoire …

Prenons la notion de longueur. Elle suppose de déterminer une unité de longueur (le mètre), les multiples de cette unité (le décamètre, l’hectomètre, le kilomètre), les sous-multiples de cette unité (le décimètre, le centimètre, le millimètre).

Et comment pourrais-je expliquer aux miens, ceux du village, ma passion pour l’astronomie ? Comment rendre claire que l’année-lumière est égale à la distance parcourue par la lumière dans le vide pendant une année julienne ?

Il y a là quelque chose de pathétique dans cette histoire.

Une petite anecdote pour souligner mes propos : j’avais demandé à un des nôtres de me dire la superficie de la République centrafricaine, il m’avait répondu sans sourciller en français, 622.000 km2. Je lui ai demandé de me dire la même chose en sango, langue pour laquelle beaucoup de centrafricains vouent une croyance immodérée, il n’a pas su le dire. Je vous laisse méditer sur la valeur de cette langue pour laquelle on a opté en reléguant aux oubliettes le patrimoine linguistique de nos grands-parents. Par pure décence, je ne lui ai pas demandé de dire la même chose en banda.

Voilà pourquoi, dès aujourd’hui, dans une démarche participative et collaborative, nous devrions tous nous atteler à la tache de construire nos outils du futur. Pour l’instant, même avec l’accord de principe de certains, je continue seul mes investigations. Je suis heureux de l’évolution de mon travail et surtout de l’effet sur moi. Une prise de conscience sans commune mesure.

 Ce serait une grossière erreur de juste apprendre le banda de nos parents pour s’en sortir. Nous avons une dizaine de siècle à rattraper.

Écrire son petit livre en tant que contribution ne suffira pas à nous sortir de notre dévoiement.

Lire son catéchisme banda ne suffira pas à nous sortir de notre abyssal trou.

Chanter son banda au micro de son orchestre ne suffira pas à nous sortir des excavations que nous occupons depuis trop longtemps.

Parler son banda en petit comité ne suffira pas à nous sortir de notre maelström.

Ceux qui ont pris de l’ascendance sur notre planète étaient au départ comme tout le monde. Ils l’ont fait en imposant leur langue, leur présence sur tous les territoires, la terre, les eaux et maintenant le ciel. Ils n’ont pas attendu la permission d’un dieu, d’une Onu. Ils ont imposé leur histoire. Ils ont fait leur histoire.

 À bientôt.

Stanislas Banda
Inji balé, Ocho balé
Uzu balé, ama balé

Kokoroko Afrobeat Collective!!!

J’avais juste envie de partager avec vous un peu de cette musique qui me parle énormément. Elle puise ces racines dans notre Afrique natale. Ceux qui aiment le Highlife vont s’y retrouver. Ces jeunes londoniens, dans leur métissage, ont su marier leur patrimoine et la modernité. Cela change de la mièvrerie ambiante.

Écoutez cette magnifique reprise de Fela Anikulapo Kuti sublimée par ces black altesses.

À bientôt.

Stanislas Banda
Inji balé, Ocho balé
Uzu balé, ama balé

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